Maurice De Vlaminck

Présentation


Maurice de Vlaminck est né le 4 Avril 1876 à Paris. Son père d'origine flamande, était professeur de violon. Sa mère, d'origine lorraine était pianiste. Il effectue son service militaire en Bretagne en 1898. C'est à l'occasion d'une permission qu'il rencontre en Juillet 1900 André Derain avec qui il sympathise. Cette même année, Vlaminck loue avec lui un petit atelier sur l'île de Chatou. Cette collaboration dure un an, jusqu'au départ de Derain qui doit effectuer à son tour son service militaire.

Maurice de Vlaminck vit tout d'abord de sa musique. Il est violoniste dans des orchestres de nuit et donne des cours de musique. Doté d'une grande robustesse physique, il vit aussi des revenus qu'il obtient en participant à des tournois de boxes ou des courses cyclistes auxquels il participe. Ce n'est qu'à partir de 1906 qu'Ambroise Vollard, un marchand,  lui achète la plus grande partie de ses œuvres et lui réserve ses productions futures. Vlaminck peut alors abandonner la musique et vivre de sa peinture.

A partir de 1910, Vlaminck vit convenablement des revenus de sa peinture et peut se permettre d'effectuer des voyages. On observe alors l'apparition de nouveaux paysages dans ses compositions.

Il réalisa quasiment l'intégrale de ses œuvres dans  les paysages de la vallée de la seine : Chatou, Rueil et leurs  environs. Ses revenus, avant 1910, ne lui permettaient pas de se rendre dans le Sud alors que tous les fauves s'y rendaient (Collioure pour Derain et Matisse) et s'inspiraient des lumières et des couleurs du midi pour réaliser leurs œuvres. Il s'y rend tout de même en 1913 pour rejoindre quelques jours Derain à Martigues. Il n'y peignit que peu d'œuvres. Peu habitué à la luminosité qu'offre la région, il ne commençait à travailler qu'en fin de journée :

" Pour peindre le midi, tu attends qu'il ressemble à Chatou " (Derain).


Vlaminck, au contraire des autres fauves, ne se sentait pas à son aise dans le midi. Il ne formula jamais le désir d'y revenir.

Son œuvre est largement dominé par les paysages, mais on y trouve également des portraits et des natures mortes.


  • Les influences :

* En 1901, Vlaminck se rend à la galerie Bernheim à Paris où une cinquantaine de toile de Van Gogh sont exposées. Ce fût un véritable choc pour lui (fonction expressive et valeur explosive des couleurs portées à leur maximum d'intensité).

* A partir de 1907, Cézanne (s'inspire de la touche, de la gamme de couleurs - gris-bleu, verts, terres rosées, ocre rouge - réduction des volumes à des formes géométriques).

Paysages : période fauviste - Emballement de la couleur


Le paysage est son principal sujet de prédilection.  Ses sujets sont souvent situés en dehors de grandes zones urbanisées. Il peint en plein air, directement sur le motif selon l'héritage laissé par les impressionnistes. Le dessin est vite esquissé, sans croquis préalable. Il utilise la palette de Van Gogh, a recours aux aplats de Gauguin, utilise la touche divisionniste de Seurat et explore les volumes de Cézanne.

Son œuvre Fauve est réalisé, nous l'avons vu précédemment, dans un périmètre situé à l'Ouest de Paris, à Chatou et dans ses environs, depuis Argenteuil, Carrières-sur-Seine, Nanterre et la plaine du mont Valérien, Rueil, Bougival, Marly, Le Pecq, Poissy, Vilennes-sur-Seine et à partir de 1906, Le Havre.

Le motif du pont est récurent chez l'artiste. Toutefois, le pont disparait parfois pour privilégier l'activité humaine. La représentation de l'activité commerciale n'est pas le but recherché par Vlaminck. Il cherche à représenter le pittoresque d'une scène (cf. Seine au pont de Pecq).


La Seine au Pont de Pecq, 1905
Huile sur toile, 54X74 cm
Kunststiftung Merzbacher


Berges de la Seine à Chatou, 1906
Huile sur toile, 53 X 65 cm
Collection particulière


La Seine à Chatou, 1905
Huile sur toile, 50 X 65 cm


Le pont de Chatou, 1905
Huile sur toile, 50,5X65,7 cm
The Museum of Fine Arts, Houston


Il représenta à plusieurs reprises, malgré le peu d'intérêt qu'il accordait  au paysage industriel, la grande papeterie de Nanterre construite en 1904. Il l'intégra régulièrement dans ses œuvres jusqu'en 1907. (cf. Les pêcheurs à Nanterre,  La papeterie Nanterre,  Les bords de la seine à Nanterre).

La papeterie, Nanterre, 1904
Huile sur toile
Zurich, Foundation
Collection E.G. Bührle


Les bords de la Seine à Nanterre, 1904
Huile sur toile, 38X46 cm


Les pêcheurs à Nanterre, 1906
Huile sur toile
Collection particulière


Les Ramasseurs de pommes de terre, 1905
Huile sur toile, 46 X 55,7 cm
Kunststiftung Merzbacher



De petites silhouettes animent des paysages habituellement dénués de toute présence humaine et illustrent en général le travail de la terre, les loisirs liés à la nature ou la navigation fluviale. Ces silhouettes sont rapidement figurées et constituent un élément stabilisant de la composition, un rôle structurel dans l'organisation de l'espace. Des obliques ou des verticales prononcées (mats de bateaux, cheminés d'usines, troncs d'arbres, silhouettes) contrastes avec les plans horizontaux (cf. Derain, Vue de Collioure, 1905). Il emprunte à Van Gogh la robustesse d'une touche charpentée aux orientations multiples qui génère la forme et dynamise l'ensemble. (cf. Ramasseurs de pommes de terre). Il emploie des couleurs pures telles que sorties du tube, sans mélange et nuances. La fonction mimétique de la couleur est abandonnée (ton non imitatif).

Il expérimente de nouvelle façon de représenter ses sujets : cadrages différents, plans rapprochés, surplombs. Des ses premières œuvres fauves, la division de la touche, venue des néo-impressionnistes et observé dans Luxe, Calme et Volupté (Matisse, 1905) côtoie la dilution de la couleur, tandis que la touche de Van Gogh, épaisse, expressive et aux mouvements contradictoire, côtoie l'aplat.


Faubourg de Collioure ou Vue de Collioure, 1905
Derain, Huile sur toile


Luxe, Calme et Volupté, 1904, Matisse
Huile sur toile, Musée d'Orsay



A partir de 1905, la transposition de la réalité mêle perception de l'instant et expression gestuelle et laisse libre cours au débordement arbitraire de la couleur ainsi qu'à la déformation sélective.

A partir de 1907, malgré un attachement persistant à la couleur, la palette s'attenue. Vlaminck s'éloigne du fauvisme. Certaines de ses œuvres laissent aux couleurs leur intensité : l'opposition de deux primaires (bleu/rouge), caractéristique du fauvisme n'est pas abandonnée (cf. pont de Chatou  et Vins Liqueur).

Vins, Liqueurs, 1910
Huile sur toile, 73 X 92 cm
Collection particulière, Belgique


Paysages : période Cézanienne - Constuction et restitution de l'espace pictural


" Le jeu de la couleur pure, orchestration outrancière dans laquelle je m'étais jeté à corps perdu, ne me contentait plus. Je souffrais de ne pouvoir frapper plus fort, d'être arrivé au maximum d'intensité, limité que je demeurais par le bleu et le rouge du marchand de couleur. "


A partir de 1907-1908, Vlaminck prend ses distances avec le fauvisme mais continu à privilégier les paysages de la Seine. L'imbrication des volumes, la synthétisation des formes et la restitution de l'espace par facettes devient sa priorité : simplification des formes, réduction des volumes à des figures géométriques rapprochent Vlaminck des travaux  de Picasso et Braque mais il ne franchira jamais totalement la frontière le conduisant vers le cubisme. En effet, Vlaminck considère le cubisme comme un système d'abstraction intellectuelle équivalant à une totale négation de la nature. D'ailleurs, Vlaminck n'appréciait guère Picasso : " Picasso est coupable d'avoir entrainé la peinture française dans la plus mortelle impasse, dans une indescriptible confusion […] ".
Village à l'église, 1910
Huile sur toile, 73,5 X 54,2 cm
San Diego Museum of Art, San Diego
Village au bord de la Seine, 1915
Huile sur toile, 55 X 70,5 cm
San Diego Museum of Art, San Diego

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Après la deuxième guerre mondiale, Vlaminck se tourne vers un naturalisme à résonnance romantique : paysages tempétueux et villages enneigés sont désormais les sujets de prédilection de l'artiste.



Rue de Village en Hiver, vers 1930
Huile sur toile, 33, 5 x 41 cm
    Collection particulière.

Les portraits

" Une série de portraits du peuple, des portraits de caractère, des portraits vrais comme des paysages vivants, des paysages humains tristes ou beaux, avec toutes leurs tares, leur grâce indigente et crasseuse " (Portraits avant décès).



La présence de portraits reste très discrète dans la production de Vlaminck. Les portraits féminins aux maquillages outranciers sont pour la plupart des prostitués du cabaret montmartrois qu'il fréquentait régulièrement avec Derain. Le maquillage offre à Vlaminck la possibilité de d'expérimenter de nouvelles transpositions  chromatiques.

Il préfigure les déformations expressionnistes. Il s'agit de  simplifier et d'accentuer les formes avec une brutalité proche de la caricature (aplanissement de la surface). Si la figure reste caractérisée, elle est tout sauf descriptive. Le visage ne jouit pas de l'immunité habituelle et semble traité pratiquement avec le même degré de décomposition que le fond.



Sur le Zinc, 1900
Huile sur toile, 41X32 cm
Musée Calver, Avignon
L'homme à la pipe ou le Père Bouju
1900, Huile sur toile
73X50 cm, Centre Georges Pompidou
Paris


Sa rencontre avec Derain semble modifier le traitement pictural réalisé par Vlaminck. Les couleurs sont violentes mais les œuvres semblent plus structurées et les touches rangées de manière plus méthodique.  De 1905 à 1906, les corps sont dessinés avec une précision relative, et situés au premier plan. Le fond est entièrement recouvert de touches de couleur, organisées de deux manières différentes :

  •                 Mosaïque constituée de touches-virgules resserrées les unes contre les autres et qui forment des cercles dynamiques animés par un mouvement giratoire .
  •                 Touches libres, espacées, pratiquement autonomes .

La danseuse du Rat Mort, 1906
Collection particulière
Portrait de femme ou Femme au chien, 1906
La fille du Rat Mort, 1905
Huile sur toile, 78X65,5 cm
Kunststiftung Merzbacher
La fille du Rat Mort, 1905
Huile sur toile, 32,7X46,7  cm
Collection particulière

Les natures mortes

Il choisit de représenter les objets les plus banals, la vaisselle la plus ordinaire, les fruits de saison les plus commun. Il aime peindre les torchons à liseré rouge, les pots à fleurettes, les compotiers de vulgaire faïence, tous objets intemporels qu'on trouve depuis toujours dans les plus simples intérieurs.

Les premières séries de peintures mortes semblent avoir subit les influences de Van Gogh : on retrouve les harmonies orangées ou jaunes ponctuées de vermillon qui lui étaient si chère.

Nature morte au compotier, 1905
Huile sur toile - 46 x 55 cm
Chartres, Musée des Beaux-Arts (dépôt privé permanent)

Les rouges et les jaunes des premières natures mortes laissent peu à peu une place prépondérante aux bleus de Prusse et aux blancs. La touche en virgules tourbillonnantes de Van Gogh laisse la place aux couleurs posées en tâches. Vlaminck s'inspire désormais des œuvres de Cézanne et de ces principes :

  •                 Discerner les volumes élémentaires,
  •                 Dégager l'essence géométrique des paysages de Provence ou des compositions de pommes,
  •                 Traduire la lumière en facette colorée.

On assiste alors à l'apparition d'harmonies insolites de bruns, de verts, de beiges et de gris discrets dans ses œuvres. La peinture de Vlaminck se " décolore ", en même temps qu'il porte une attention particulière à l'expression de la profondeur. La gamme sombre, plutôt terne, est éclairée par des blancs qui demeureront la marque distinctive de la peinture de Vlaminck au long des années. Cet assagissement dans l'emploi des couleurs n'est que passager ou alterne avec des compositions encore rutilantes.
Nature morte aux amandes, 1907
Huile sur toile, 54 X 65,7 cm
Collection particulière
Le compotier, 1909
Huile sur toile, 72 X 92 cm
Collection particulière

Vlaminck, c'est aussi...


La Faïence


En 1906, Ambroise Vollard encourage Vlaminck à collaborer avec le maitre céramiste André Metthey. De cette collaboration sortira plusieurs centaines d'assiettes, plats et vases. Ces céramiques recevront un mauvais accueil du public. Vlaminck ne fût pas le seul artiste à se lancer dans cette aventure. On peut notamment citer Renoir, Odile Redon, Matisse, Othon Friesz, etc. Cette expérience ne durera que de 1906 à 1910. Quelques artistes, dont Vlaminck, continueront au-delà de cette date (1912). Vlaminck est l'artiste qui produira le plus de pièces (environ 150). Les thèmes qu'il aborde sont essentiellement floraux ou animaliers : oiseaux, poules, coqs et paons, panthère. Toutefois, il a aussi intégré des têtes de femmes dans certaines de ses créations.

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L'art africain



Dès 1905, Vlaminck est le premier artiste à s'intéresser aux objets d'art africain et océanien (ce fait est parfois contesté). Paradoxalement, cet intérêt pour l'art africain influençait très peu ses productions artistiques, alors qu'il inspira tant d'autres artistes, notamment les cubistes Braque et Picasso.

Bibliographie



  •                 VALLES-BLED Maïthé, Vlaminck un instinct fauve, édition SKIRA, 2008, 223 p. , ISBN 978-88-6130-628-8

  •                 Collectif, Vlaminck un instinct fauve, Connaissance des arts, Hors série n° 351, 66 pages.





© C.Malgaroli Cliquez ici pour vous abonner à ce flux RSSDernière mise à jour samedi 10 janvier 2015    phpMyVisites